Éducatrice spécialisée HES-SO, coach membre de SECA, enseignante, auteure, peintre

Le creuset

2025
34x56 / Acrylique, mastic
Chant : Je m’abandonne / Hillsong / Jamsix Studio Production   
             I surrender / Hillsong Worship
 
Les épreuves servent à éprouver la valeur de votre foi. Le feu du creuset n’éprouve-t-il pas l’or qui pourtant disparaîtra un jour ? Mais beaucoup plus précieuse que l’or périssable est la foi qui a résisté à l’épreuve. Elle vous vaudra louange, gloire et honneur, lorsque Jésus-Christ apparaîtra.
1 Pierre 1 :7
 
Au moment d’écrire ce texte, je me sens saturée, épuisée, vide. J’ai envie de repousser à demain car je n’en peux plus. Mais je me dis que c’est justement dans un tel moment que je peux écrire un texte sur l’épreuve.
 
Les nouvelles mauvaises pleuvent, martèlent, enfoncent les clous des dérives du monde. Je me sens impuissante face aux puissants qui deviennent fous, face aux désirs de guerre, face aux violents, aux violeurs, aux assassins, aux prédateurs qui dévorent des femmes et des enfants.
Dans les rues de ma ville, des personnes marchent les yeux rivés sur leur écran, les oreilles bouchées par des écouteurs, aveugles et sourds, intouchables. Je me sens impuissante face au mutisme, à l’indifférence, à la solitude.
A mon poste de travail, des collègues lancent des appels, des sos, des alarmes. Perte de sens de ce que nous faisons, perte de repères, de visions, d’unité. Je me sens impuissante face aux tâtonnements, aux demandes urgentes, aux besoins à combler rapidement.
A la maison, la chaudière s’est emballée, virant au rouge. Un tuyau a éclaté sous la pression. La vapeur brûlante a rempli le couloir. J’ai cru que la maison allait exploser. De l’eau bouillante s’est infiltrée partout. Je me sens impuissante dans le bruit des machines, le va-et-vient des artisans, la poussière.
Dans le jardin, un message d’alerte. Une fille a fugué et sa mère est affolée. Demande de prière. Un autre message. Un père pleure la mort de son fils de 23 ans, survenue brutalement. Demande de réponses.
Des appels à l’aide partout où je regarde, partout où j’écoute, partout où je suis.
Dans mon corps, une grande fatigue. Je sais que je devrais me mettre à genoux et prier, que je devrais lire la Bible… mais j’ai juste envie de dormir.
J’ai besoin de paix, d’amour, de silence, de solidarité, de justice, de bonté, de temps, de sagesse, de patience, de douceur…
En écrivant ces mots, je vois un visage apparaître. Jésus. Il est le Maître de tous ces mots.
 
Alors quelque chose se passe en moi. Depuis la terrasse où j’écris, j’entends un oiseau chanter. Un tissu turquoise se balance légèrement à un fil. En bouche, le goût du chocolat noir que j’ai mangé pour me donner des forces. Sur ma peau, la tiédeur de l’air de cette fin d’été. Le pot de basilic devant moi exhale son parfum. Une cloche sonne. L’envol rauque d’un corbeau. Le coussin dans mon dos. Le contraste entre le bleu pur du ciel et le vert argenté d’un sapin. L’étang est recouvert de lentilles d’eau. Un enfant bavarde au loin. Je me sens vivante. Reconnectée. Capable d’agir là où est ma mission.
Tout à l’heure, il y aura la saveur du poivron confit, l’odeur du romarin, le douceur de la joue de ma fille, le regard franc de mon mari et un murmure en mon cœur qui me dit souvent : « Tu vois, je suis là ».
Gratitude.
 
L’épreuve ne change pas la situation. Elle me transforme. Et c’est parce que j’ai changé et que ma place dans la situation est différente, que tout prend un autre aspect. Ce sur quoi je n’ai aucun pouvoir s’éloigne, perd du poids et de l’importance. Ça n’a plus le même impact sur ma vie. Les priorités, elles, émergent. Ce qui est entre mes mains, ce sur quoi je peux influer, ce dans quoi j’ai de la responsabilité entre dans mon champ de vue. Je commence à discerner les possibles, l’envie s’éveille, l’énergie se remet en marche.
Ça y est, je suis en train de sortir du creuset !